Seule la victoire est jolie

c’est la formule ( et le titre d’un livre co-écrit avec Jean Noli ) du navigateur Michel Malinovski qui, en 1978, vient de perdre après 23 jours de course la Route du Rhum avec 98 secondes d’écart à l’issue d’un final stupéfiant.

Cette phrase éclaire tout le sport: gagner, être le premier. En regardant à la télévision quelques matchs, en entendant les « han » ponctuant les balles, le score qui se creuse, le suspense montant, la souffrance de celui qui perd peu à peu, je ne peux  que regretter qu’il y ait un vainqueur et un perdant. Malheur au vaincu, aurait dit Jules César face à Vercingétorix déposant ses armes devant lui. Là c’est la guerre, l’humiliation, l’enjeu des batailles. Mais dans le sport, qu’est-ce qui nous anime au point de voir joueurs et supporteurs se déchaîner ?

A ces moments, nos sentiments sont contradictoires, voir Castres l’emporter sur le favori Toulon, voir l’outsider battre le champion sont un plaisir, mais voir perdre celui qui a si longtemps dominé le court de tennis! C’est bien me dit la psy, normal, cela permet le changement. Ce soir à Roland-Garros, le champion bat l’outsider. Le suisse Roger Federer « sort » le français Gilles Simon dans un beau match ou les deux joueurs nous ont fait vibrer. Je connais maintenant le prénom de Gilles, dit le vainqueur avec justesse. Le public français applaudit avec chaleur le suisse. Gilles Simon remercie la chance qui lui a permis de jouer contre le champion. Federer a déjà des mots pour évoquer ceux qui lui succéderont, peut-être celui qu’il a battu aujourd’hui. Et la victoire de l’un et la défaite de l’autre sont jolies.

 L’essentiel est de participer, disait le créateur des Jeux Olympiques, Pierre de Coubertin. Dans le foot, on en est donc si loin aujourd’hui que parfois on se demande pourquoi on joue encore dans les stades ou la violence règne? L’équipe du Gruppo sportivo exceslsior de Bolzano dans le Trentin-Haut-Adige, au nord de l’Italie, réconforterait Pierre de Coubertin s’il était toujours de ce monde: Ici on apprend à perdre, explique le responsable du club. Un minutomètre permet à tous les joueurs de participer à égalité de temps pendant le match. Ici avant d’être un joueur bon ou mauvais, vous êtes une personne, se réjouit le dirigeant du club!

Avouez que cette étrangeté donne envie d’aller voir du coté de Bolzano. Et merci au Monde magazine de diffuser ce type d’informations.

Une bonne nouvelle aussi chez nous à Montparnasse, celle du 10 000° fan de la Manufacture du Changement. Pour l’occasion, la Manufacture met en Une, le film de Coline Serreau, Solutions locales pour un désordre global, qui nous montre justement des valeurs plus proches de Bolzano que de celles de ceux qui gagnent en écrasant, celles d’une frugalité heureuse peut-être, d’une proximité avec les hommes encore.

 

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