la mer comme horizon ?

à vrai dire non!  La descente de l’été s’achève sur les bords de l’étang de Vaccarès, en Camargue. Nous n’irons pas plus loin, nous ne verrons pas les bords de mer que nous imaginons surpeuplés. Quelques jours autour d‘Arles, la belle cité aux arènes et au théâtre Antique, aux rues mélangeant maisons nobles du XVIII ème siècle et immeubles de rapports du siècle de Balzac. L’air est à la fête. Les visages sont joyeux, les allures décontractées. L’Ecole royale Andalouse d’Art Equestre de Jerez passe le soir dans les Arènes. Avec des décors de Christian Lacroix, un enfant du pays. C’est époustouflant de beauté et de maîtrise, l’homme et la bête font corps. Les mains et les jambes agissent à la perfection. Les épaules du cavalier indiquent l’effort. Le public est enthousiaste. Nous applaudissons la puissance et la grâce. Le lendemain matin, nous rencontrerons en pleine Camargue, les propriétaires de la manade des Marquises. Ils nous emmènent à un tri de taureaux , 6 à sélectionner pour deux courses du soir dans les villes alentours. La famille entière est à cheval, Paul le patriarche et son épouse, Patrick, le manadier, son fils 9 ans et demi. Sa femme, Estelle, a délaissé le cheval pour nous piloter en voiture. Nous regardons la dizaines de cavaliers opérer avec précision au milieu d’un troupeau d’une cinquantaine de bêtes noires aux cornes dressées.

Estelle, élève en droit à Aix-en-Provence, préparait Sciences-Po, lorsqu’elle a eu le coup de foudre, pour Patrick, pour la Camargue, pour les taureaux. J’admire la justesse de sa position, l’aisance de ses mots dans la description de son métier. Elle est devenue une remarquable manadière. Son beau-père, Paul, ami de Dominguin, d’El Cordobès, du haut de ses 80 ans, nous montre dans son salon les trophées, ceux des taureaux camarguais qui contrairement aux taureaux de corridas ne meurent que de leurs belles retraites lorsqu’ils sont des champions. Chaque année le meilleur taureau de la saison camarguaise est consacré Biou d’or. La manade des Marquises détient des records avec des taureaux aux noms célèbres. Nous évoquons le livre de Simon Casas, la Corrida parfaite, acheté la veille à la belle librairie d‘Actes Sud à Arles – j’y reviendrai un instant- et édité au Diable Vauvert. Paul Laurent a assisté à la prestation de José Tomas le 16 septembre 2012 dans les arènes de Nîmes. C’était une liturgie parfaite, un moment ou tout se rencontrait, le temps, le geste, l’harmonie. Simon Casas a écrit un livre sur une corrida qui n’a pas été filmé, José Tomas s’y refusant. …et vous êtes vraiment obligé d’habiter à Paris? nous demande Estelle,en nous raccompagnant à la voiture,  avec une pointe de commisération pour ces parisiens qui ne savent pas ce qu’ils perdent! Oui, vraiment doit-on habiter à Paris?

Et moi j’entends la passion d’un homme, pour son pays, ses coutumes, les hommes, les chevaux, les taureaux, et je me dis que décidément il faut savoir écouter parler les traditions et s’en souvenir. Belle rencontres, m’étais-je promis. Elles sont nombreuses, la libraire d’Actes Sud, dont j’ignore le nom mais qui me parle de Heinrich Steinfest édité chez nous. J’adore, il est passionnant. Évidement cela fait plaisir. Son rayon polar-thriller est abondant, attirant. Elle connait ses auteurs, aime lire. Comment imaginer que le libraire disparaisse, alors que sa passion et le partage qu’il en fait est si importante pour nous, lecteurs ? Enfin pour terminer ce voyage vers le Sud, comment ne pas partager aussi les passions de Nicolo, qui tient un petit restaurant dans les rues montantes des arènes. Italien d’origine, arlésien d’adoption, il invente ses plats au goût méditerranéen. Goûtez la pastilla de madame Saîd, recette cette fois de la mère de son cuisinier, un régal! et parlez avec Nicolo des herbes qui aromatisent ses poissons. Il est ouvert toute l’année et change sa carte chaque semaine.

En remontant vers le nord, une dernière halte à la guinguette des amoureux sur le lac de Cécélès, près de Montpellier. Les amoureux sont les bienvenus, mais aussi les familles, le baiser devant le lac au coucher de soleil fortement conseillé, l’aimable et jolie serveuse vous apportera un verre de rosé qui, du coin évidemment, enchantera vos papilles.  La route buissonnière nous fera faire une dernière étape immortelle, celle d‘Albi, de la cathédrale Sainte-Cécile, tout en rose de pierres, farouchement dressée vers le ciel. Là encore après l’avoir admirée- c’est pour moi une des constructions » spirituelles » les plus impressionnantes que je connaisse- engouffrez-vous dans le marché couvert, et stoppez pour un bel instant à la Loge au grain. Le rôtisseur, en plus de ses poulets parfaitement cuits et de ses irrésistibles pommes de terre légèrement aillés, vous propose de délicieux plats qui viennent de ses voisins du marché. C’est fin, frais, pas cher, et servi avec l’amabilité bourrue et sincère des gens du cru.

Voilà, ce tour en France s’arrête. Depuis deux jours j’ai repris, comme bien d’autres, à Paris quelques activités nourrissantes. Je ne suis pas allé bien loin, à Bali ou ailleurs, à des heures exotiques d’avion. Non je suis resté chez moi.

Merci à Jacques Malaterre qui m’avait donné une introduction auprès des Laurent chez qui il a tourné Carmen.

 

 

 

 

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