La vie malgré tout

J’ai parlé de cet état de sidération qui peut nous étreindre. Pour nous qui habitons dans ce quartier touché si cruellement, qui pensons à ceux qui ont perdu l’un des leurs, les lieux nous parlent sans cesse de la cruauté, de la mort donnée par d’autres humains, de la vie qui continue. Mais comment continue-t-elle, cette vie ? N’y a-t-il pas une sorte de mécanique de la vie: gestes accomplis par nécessité. Je mange, je parle, je travaille, je souris, je ris même, j’aime, je retourne aux terrasses de café, bientôt j’irai au théâtre, au concert, danser…je prends le métro parce qu’il faut bien. Je vis !

Je lis. Je découvre le monde de « La guerre n’a pas un visage de femme« , du Prix Nobel de littérature, Svetlana Alexievitch. Les témoignages de celles qui partirent défendre leur pays, l’Union soviétique, en 1941, alors qu’elles ont moins de vingt ans. Elles sont toutes volontaires, elles sont jeunes, elles ne savent pas ce qu’elles vont rencontrer. Elles témoignent. Mon cœur se serre, en les écoutant, de pitié et d’admiration. Témoignages de celles qui ont survécu, traversé l’enfer, trouvé l’horreur et la beauté. « Je peux raconter comment je me battais. Mais raconter comment je pleurais, ça non, je ne peux pas. Cela restera non dit... » Anastasia Ivanovna Medvedkina, simple soldat mitrailleur. Non, la guerre n’a pas un visage de femme. La guerre, invention des hommes? Mais des femmes se battaient sublimées par le Petit Père des peuples, Staline,  dont elles ignoraient le coté monstrueux. Force de l’aveuglement de l’idéologie que l’on peut retrouver aujourd’hui dans l’islamisme.

Je travaille. J »accompagne samedi Georges Pernoud à une série de décicaces dans deux librairies de Nantes pour son autobiographie que nous publions, Bon vent.  Toute la nuit de vendredi, Thalassa a diffusé sur France 3 des émissions pour le 40° anniversaire de l’émission. Record de longévité ( seul le Jour du Seigneur la bat avec la première diffusion de la messe de Noël en 1949 !), record de modestie encore. Georges Pernoud est « accosté » à chaque instant par un « ami » admirateur: merci, monsieur Pernoud pour ce que vous nous donnez », « bravo Georges, » disent certains plus familiers, et Georges, avec son air de faux ours, remercie à son tour: c’est vous que je remercie de regarder Thalassa, nous nous faisons notre métier. Simple non.

Deux librairies de Nantes. Durance, en centre ville, un idéal de librairie, deux générations de libraires, les Cousinard, une petite entreprise de 19 personnes, un goût transmis partout dans chaque rayon, dans chaque livre présenté, dans l’atmosphère même. Les »collaborateurs » affichent leurs choix dans une sélection affirmée et revendiquée. Bravo à Daniel Cousinard, qui de sa cabine de pilotage, nous dit à quel point les mots sont essentiels.

L’après-midi, à l‘Espace culturel Leclerc, je vois la file  du public venu pour la dédicace ne cesser de s’allonger. Le responsable de l’Espace, Philippe Rateau, est heureux: j’aime voir les gens sourire, parler entre eux, se réjouir à l’idée de rencontrer quelqu’un qu’ils aiment. Georges a un mot pour chacun, s’enquiert de leur intention. Pour Andrée et Bernard…signature ponctuée d’un poisson, emblème de l’émission. Les selfies rallongent la signature. Je le presse. Tous doivent avoir leur signature avant le retour à Paris. Oui, la vie continue!

 

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